Licenciée en Droit de l’Université Protestante au Congo et détentrice d’un diplôme d’Études spécialisées en Droits de l’homme des Facultés universitaires de St Louis à Bruxelles, Maître Kisolokele Mvete Maleka est Directeur Général Adjoint du Guichet Unique de Création d’Entreprise. Un établissement public dont elle a été parmi les pionniers de sa mise en œuvre.
Veuillez-vous présenter et relater votre parcours académique et professionnel
Je suis Maitre Kisolokele Mvete Maleka. Avocate, Chef de travaux et Secrétaire du Département Droit privé et judiciaire à la Faculté de Droit de l’Université Protestante au Congo(UPC), je suis actuellement DGA du GUCE.
J’ai été conseillère juridique dans différentes ONG et ASBL avant de rejoindre le Cabinet du Professeur Luzolo Bambi, Ministre de la justice et Droits Humains en 2009 au sein duquel j’ai œuvré en tant que chargée d’études avant d’être nommée conseillère juridique jusqu’en 2012.
Et, c’est en 2013, après avoir répondu à un avis à manifestation d’intérêt que j’ai été nommée par le chef de l’Etat comme Directeur Général Adjoint du Guichet Unique de création d’entreprise.
Quelles sont les défis rencontrés au quotidien à ce poste de DGA du GUCE ?
Le secteur économique est un monde avec des défis divers et qui est soumis à des impératifs de développement durable notamment l’amélioration du climat des affaires.
C’est dans cette optique et dans le souci de répondre aux attentes des opérateurs économiques que le GUCE, qui n’existait pas jusque-là, a été mis en place.
Et, le Directeur Général et moi (Directeur Général Adjoint) avions la charge de mettre en marche le Guichet Unique de Création d’Entreprise sur le plan opérationnel. Cela constituait un vrai un défi du fait de la nouveauté du service. Il est, en effet, vrai que lorsqu’ on est nommé dans une entreprise, un service ou un établissement public existant, on y trouve déjà une organisation établie. Mais dans notre cas, nous devions partir de zéro et rendre opérationnel, viable et performante cette nouvelle structure qu’était le GUCE.
J’estime que c’est un défi que nous avons pu relever.
Quelles sont les différentes réformes que vous avez apportées au GUCE à ce jour ?
Tout d’abord le GUCE, en lui-même est une des réformes-clés du gouvernement.
Pour notre part, nous avons pu rendre effective la mission principale du GUCE qui est la facilitation de la création d’entreprises en RDC. En effet, cette réforme a permis non seulement la réduction du coût et du délai de création d’entreprise mais aussi la centralisation de toutes les procédures de création d’entreprise. En effet, le coût et le délai de création d’entreprise qui étaient évalués avant à près de 3.000 dollars américains et à 155 jours par le rapport Doing Business de la Banque Mondiale, ont été sensiblement réduit à l’équivalent en Franc Congolais de 80 USD et à 3 jours ouvrables grâce à la réforme du GUCE.
En outre, la centralisation de toutes les procédures de création d’entreprise a permis de réduire le nombre d’administrations à contacter. De 13 administrations différentes qu’il fallait contacter, avec les tracasseries que cela pouvait entraîner, nous sommes arrivés aujourd’hui à un service unique qui est la seule interface entre l’opérateur économique et l’administration publique en matière de création d’entreprise.
Sur le plan international, la réforme du Guichet Unique de Création d’Entreprise a également permis à l’indicateur création d’entreprise de connaître une évolution significative dans le classement du Rapport Doing Business de Banque Mondiale. La République Démocratique du Congo a pu gagner près de 120 places dans ledit Rapport les années suivant la mise en place du GUCE. En 2020, La RDC a été classée au 7ème rang sur le plan Africain et au 54ème rang sur le plan mondial. Des avancées non négligeables de la part du GUCE.
Je profite de cette occasion pour remercier toute nos équipes et collaborateurs car la réussite du GUCE est le fruit d’un travail collectif.
Comment le Guichet Unique de Création d’Entreprises accompagne-t-il la femme entrepreneure ?
Pour accompagner la femme entrepreneure, le GUCE a travaillé sur la communication et la collaboration avec les femmes entrepreneures. En effet, lorsque nous avons démarré nos activités au niveau du GUCE, nous avons constaté qu’après 3 mois qu’il n’y avait que 7% des femmes qui avaient formalisé leurs activités commerciales. Fort de ce constat, nous sommes allés vers les femmes. Nous avons travaillé sur une stratégie de communication en organisant des ateliers, séminaires et conférences et des descentes sur terrain afin de faire connaitre notre institution ainsi que son importance aux femmes. Nous avons sensibilisé et vulgarisé la réforme sur la création d’entreprise. À ce jour, nous sommes passés de 7% à 35% des femmes qui ont créée leurs entreprises. Nous restons toujours dans une démarche d’accroissement de ces statistiques. Et, pour ce faire, nous collaborons avec différentes associations et fédérations des femmes entrepreneures congolaises.
Quelles sont les perspectives du GUCE pour les années à venir ?
Le GUCE a comme perspectives de s’étendre dans tout le pays car à ce jour, le GUCE n’est installé que dans certaines provinces. Vous trouverez les antennes provinciales du GUCE à Kinshasa- Gombe, Kinshasa- Matete, Lubumbashi, Kisangani, Goma et Bukavu et des bureaux du GUCE à Kolwezi, Isiro, Mbuji-Mayi et Kananga. L’extension du GUCE dans les autres provinces permettrait à tous les opérateurs économiques congolais de bénéficier des facilités offertes par le GUCE particulièrement la femme entrepreneure qui évolue également dans le milieu rural.
En outre, aujourd’hui que nous sommes à l’ère de l’informatisation et de la numérisation, nous avons dû y recourir pour accélérer le processus de création d’entreprise, qui était jadis manuel, et le rendre plus fiable et plus performant. Et, l’étape suivante est la création en ligne d’une entreprise peu importe l’endroit où l’on se trouve.
Quel conseil donneriez-vous à une personne qui est au tout début de sa carrière professionnelle ?
D’être humble, d’écouter et respecter les avis des autres peu importe le poste qu’on occupe. L’avis de l’autre compte énormément dans le monde professionnel. Alors, il faut savoir écouter et analyser chaque avis reçu. En écoutant l’autre on peut apprendre et en apprenant de l’autre, on peut faire de grandes choses. Et enfin d’être innovante et ingénieuse pour être compétitive.
Quelle est votre perception sur le rôle de la femme dans le milieu professionnel ?
Le rôle de la femme est essentiel tant dans le milieu professionnel que social. Par conséquent, la femme doit être entendue, valorisée et appréciée par la société parce qu’elle est le moteur du développement de notre pays. Et tant qu’elle ne sera pas considérée à sa juste valeur, je ne pense pas que notre société pourra pleinement s’épanouir.
Un travail doit dès lors être fait au niveau de la jeune fille. Celle-ci devant être porteuse des valeurs et de l’espoir pour un futur meilleur pour la RDC ; elle doit prendre conscience de ce qu’elle représente dans la société. Mon souhait est de présenter à ces jeunes filles des modèles de femmes qui, par leur expérience et leur combat, pourraient être des références pour elles en promouvant des exemples de leadership féminin. Cela leur permettrait de se projeter dans l’avenir et de se rendre compte que tout n’est pas seulement question de genre mais de compétence.
Que faut-il faire aujourd’hui pour que la parité Homme-femme soit effective tant dans le milieu professionnel que dans la société en général ?
C’est une question de volonté de tous. Car sur le plan juridique, plusieurs textes consacrent déjà l’égalité de la femme et la parité homme-femme. Il faut juste que cette reconnaissance juridique devienne effective et que sa mise en œuvre soit réelle. Et cela relève d’un effort de tous (femme et homme) et ce, dans tous les secteurs d’activités et à tous les niveaux.
Quelles sont les deux personnalités qui vous inspirent ?
Premièrement mon arrière-grand-mère, Maman Marie Mwilu Kiawanga. Une femme forte qui a pu, par sa bravoure et sa résilience, braver l’autorité coloniale dans un contexte politique, social et culturel hostile afin de pérenniser l’œuvre de son mari, le prophète Simon Kimbangu. Son combat est ma source d’inspiration au quotidien.
Ensuite, il y a cette femme congolaise anonyme qui se lève tous les jours à 4h00 du matin pour aller chercher de quoi nourrir sa famille. Une bravoure que je salue particulièrement.