Directrice Générale a.i du fonds d’entretien des routes (FONER), Georgine Selemani Tulia est une femme qui défie tous les stéréotypes par son travail sérieux et acharné à la tête de cette structure dont elle a pris les rênes en mai 2020. Dans cette interview qu’elle a accordée au Magazine Ici et Ailleurs, elle souligne les principales réformes qu’elle a initiées depuis son entrée en fonction.
Pourriez-vous vous présenter en quelques mots ?
En effet, j’ai une expérience professionnelle de plus de 10 ans dans les agences des Nations Unies, notamment l’UNHCR, l’UNICEF, PNUD et certains projets de la Banque mondiale. À cette expérience s’ajoutent 10 ans et 6 mois de mon exercice des fonctions du Directeur Général Adjoint du FONER. À ce jour, j’assume l’intérim du Directeur Général du FONER depuis mai 2020. Je suis détentrice d’un diplôme de licence en Sciences Économiques Appliquées de la Faculté Universitaire Catholique de Mons (FUCAM) en Belgique, d’un diplôme spécial en Économie et Développement de la Faculté Catholique de Kinshasa, d’un diplôme d’études spécialisées en Finances d’Entreprise de l’Université du Québec à Montréal (UQAM) au Canada. J’ai suivi également plusieurs formations sur RONET (Road Network Evaluation Tools), les procédures de la Passation des Marchés des Projets financés par la Banque Mondiale et tant d’autres.
Depuis 2020 vous êtes Directrice Générale du Fonds d’Entretien Routier. Quelles sont les réformes que vous avez entreprises jusque-là ?
Les réalisations dans une structure humaine appellent avant tout le choix, l’adhésion et la capacitation des individus qui doivent vous accompagner dans les idées réformatrices et innovatrices. Ainsi, j’ai d’abord misé sur l’homme au FONER. Par un leadership exemplaire, j’ai motivé chacun à donner le meilleur de lui-même en rendant au FONER l’essentiel de son potentiel. C’était un coup de pouce à tous les agents pour intérioriser la pensée de l’excellence. J’ai eu à tenir des réunions et des sessions de sensibilisation avec tous les agents, à tous les niveaux et même avec les femmes séparément. Tout ceci pour me convaincre en moi-même que la mentalité de l’excellence et l’amour du travail bien fait sont inculqués à mon personnel. C’est ce qui a été le plus important au départ pour moi. Je suis heureuse parce qu’aujourd’hui au FONER, tout le monde travaille et personne ne se tourne les pouces.
Pour les deux ans passés, je tiens à rappeler que j’assume l’intérim du DG ai du FONER depuis mai 2020 et sur cette période le FONER a fondamentalement changé sur le plan opérationnel.
Par un nouveau management que j’ai instauré au FONER et une mise en œuvre de mon plan stratégique de redressement du FONER qui, je dois vous le rappeler, repose sur deux piliers à savoir : (i) la mobilisation maximale des ressources du FONER et (ii) le Financement efficient des travaux d’entretien routier. Les résultats obtenus ont été (i) l’accroissement des ressources mobilisées par le FONER avec un taux d’accroissement de 47,7% au passage de 2020 à 2021.
Pour ce qui concerne le financement des routes, j’ai financé le programme d’entretien routier de l’Office des routes avec un taux d’accroissement de 62,31% comparativement au financement de 2020. En ce qui concerne l’OVD, j’ai financé son programme avec un taux d’accroissement 48,47% comparativement à 2020. Et je suis vraiment fière de moi-même d’avoir financé le Programme d’Entretien Routier (PER 2021) de l’OVDA avec un taux d’accroissement de 280,53 % comparativement à 2020. Vous savez pour bien se nourrir en ville, il faudrait que les produits agricoles quittent les centres de production vers les centres de consommation ; les routes de desserte agricole jouent un rôle du premier plan.
J’ai mis en place des mécanismes de vérification de la qualité de la dépense liée au financement des agences routières, (i) les missions d’inspections des travaux dans presque toutes les provinces de la RDC effectuées par le FONER, (ii) Paiement direct des prestations du Bureau Technique de Contrôle pour garantir son indépendance ; (iii) organisation des audits techniques et financiers indépendants des travaux routiers qui est en cours d’exécution en 2022.
J’ai connecté le FONER au logiciel douanier de la DGDA, Sydonia world pour le suivi en temps réel des perceptions de la redevance FONER et j’ai organisé des formations du personnel dans divers domaines.
Sur le plan Administratif, j’ai élaboré un cadre organique adapté et fonctionnel du personnel et d’un statut du personnel du FONER.
J’ai mis en place la Cellule de Gestion des Projets et des Marchés Publics et j’ai élaboré le Plan annuel de Passation des Marchés (PPM). Sur le plan Juridique, j’ai clôturé à l’amiable tous les procès opposant les tiers au FONER.
Sur le plan financier et comptable, j’ai doté le FONER d’un logiciel Comptable TOMPORTAIL WEB qui facilite la transparence, la traçabilité et la fiabilité de toutes les opérations financières et comptables.
Sur le plan de Contrôle interne et Externe, j’ai mis en place une Direction d’Audit Interne du FONER ; et j’ai été auditée par l’Inspection Générale des Finances et la Banque Mondiale.
Selon vous, quels sont trois facteurs de réussite que vous prônez et pourquoi ? Les 3 facteurs de réussite pour ma part sont :
• Un leadership exemplaire et fort qui suscite l’émulation du personnel,
• La bonne conscience professionnelle
• Le sens de la redevabilité
Évoluant dans un milieu professionnel considéré par beaucoup comme un secteur masculin. Quelles sont les principales difficultés que vous rencontrez à votre poste actuel ? Pensez-vous que si vous étiez un homme, vous alliez rencontrer les mêmes difficultés ? Qu’en tirez-vous comme leçon ?
Nous évoluons dans un monde qui ne fait pas de cadeaux. Comme vous le dites le secteur qui est le nôtre ne prône pas pour les dirigeants du genre féminin ou masculin. Tout est basé sur la compétence et les qualifications ; et un diplôme non plus n’a pas de sexe. Étant une femme dans ce secteur, je considère cela comme un atout plutôt qu’une faiblesse pour m’apitoyer sur moi-même. Je suis heureuse de travailler avec mes collègues hommes qui lorsque ça ne va pas chez eux, ils recourent à moi comme une mère qui doit trouver des solutions. Et ça, j’aime bien !
L’égalité aujourd’hui pour un avenir durable, est le thème mondial retenu pour la Journée internationale des femmes de mars 2022. Que reste-t-il à faire encore aujourd’hui dans la lutte sur l’égalité de genre ?
Dans notre société africaine et congolaise, la culture, alors la mauvaise culture continue à être une pesanteur dont il faut absolument se débarrasser pour arriver à la bonne compréhension de l’égalité de genre.
Henock KUMBALI