09/22/17 - BOSTON, MA. - Jonathan Mboyo Esole,

Jonathan Mboyo Esole : l’avenir des mathématiques en Afrique

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Professeur de mathématiques à la Northeastern University de Boston, aux États-Unis, Jonathan Esole est un expert et un chercheur international. Spécialiste en géométrique algébrique et la théorie des cordes, il est fondateur et coordinateur de la startup Covid 19 DRC et membre de la STEM team de Malaika.

Natif de la République Démocratique du Congo, Jonathan Esole a fait ses études secondaires au Collège Boboto dans la ville province de Kinshasa. Vivant à cheval entre la capitale congolaise et celle de la Belgique, il fait son premier cycle à l’Université Libre de Bruxelles avant de se lancer dans un périple de la connaissance au sein des grandes universités du monde. Étudiant du monde, Jonathan est détenteur d’un diplôme d’études avancées en mathématiques à l’université de Cambridge où il était membre du Clare Hall Collège. Et, il va ensuite décrocher son doctorat à l’université de Leiden aux Pays-Bas. Bénéficiaire de la prestigieuse bourse Marie-Curie, il a été chercheur visiteur à l’université de Stanford et à la KU-Leuven avant de rejoindre la très convoitée Université d’Havard, en tant que chercheur postdoctoral en physique d’abord, et ensuite en mathématiques.

Ses études captivent l’attention du monde scientifique et lui décernent plusieurs prix au niveau international. Jonathan Mboyo Esole va recevoir le Prix du Meilleur Mémoire de la faculté des Sciences de l’ULB ; le Prix Next Einstein Forum en 2018 ; le Prix International Dunia, et Benjamin Pierce Fellow à Harvard. Des prix qu’il dit devoir à sa passion pour la science.

«  Quand vous êtes passionnés par les sciences, c’est ce que vous voulez faire le matin, à midi et le soir. C’est un peu comme une drogue. Vous êtes impatient de comprendre, d’apporter des solutions ou un regard nouveau à des vieilles questions ; vous adorez apporter au monde un point de vue unique qui n’avait jamais été discuté avant. Après un moment, cela peut se transformer en des prix internationaux ou des positions prestigieuses. Mais en réalité, vous êtes toujours cet enfant qui veut juste comprendre et découvrir. Et en mathématique, le plus beau prix, c’est toujours les théorèmes et leurs preuves eux-mêmes comme le disait Grigori Perelman » explique-t-il.

Amoureux des chiffres, il prend plaisir dans ses recherches à résoudre des problèmes ouverts et apporter une toute nouvelle perspective. Jonathan Esole considère le succès de ses étudiants et des jeunes en sa responsabilité comme sa plus grande fierté professionnelle. Voir des jeunes qu’il prend sous son aile réussir, s’épanouir et devenir des hommes et des femmes indépendants qui inspirent d’autres à aller au bout de leurs rêves ; c’est ce qu’il peut réellement identifier comme une fierté. En parallèle, cet expert et chercheur international considère la misère qui sévit en Afrique et au Congo en particulier, comme le plus grand échec de tout congolais. Le professeur pense que, malgré les réussites individuelles que nous pouvons avoir, nous avons échoué si nos peuples vivent encore dans la pauvreté.

Admiré par plusieurs, il pense que sa génération et la suivante ont un énorme défi à relever, mais aussi une opportunité unique. Plus qu’un modèle, le physicien voudrait que les jeunes se rendent compte qu’après plus de 500 ans d’abus, l’Afrique est à un moment unique de son histoire. Cette génération a la possibilité d’apporter  un changement pour le mieux, en utilisant la science et la technologie pour redéfinir le rôle de l’Afrique dans le monde. Il estime que, le berceau de l’humanité ne doit pas rester le continent des ressources naturelles ; mais le continent de la créativité, de l’innovation et le foyer de la population la plus jeune du monde. Pour y arriver, les africains doivent compter sur eux-mêmes afin de trouver des solutions à leurs problèmes structurels complexes.

Après 500 ans d’abus, d’exploitations, d’insultes et de mépris, l’excellence est la grande valeur à transmettre à la nouvelle génération africaine et congolaise en particulier. Étant fait à l’image de Dieu, Jonathan pense que l’excellence et la perfection sont les seules valeurs dignes de l’homme congolais afin de réparer le mal grandissant dans ce beau pays.

Très attaché à son pays natal qu’il visite de temps en temps, ce natif de la RDC espère voir une paix durable dans le long terme avec une justice qui joue son rôle. Sans ces deux éléments, l’espoir de voir un grand Congo capable d’illuminer l’Afrique et le monde se réduit. Chaque jour où le pays ne sort de la médiocrité actuelle est un péché contre nous-mêmes et contre l’Afrique, a-t-il dit. À la justice et la paix, Jonathan ajoute la connaissance de son histoire et la science afin de pouvoir comprendre notre environnement pour en faire bon usage sans pour autant ruiner les équilibres de la nature.

« Le Congo doit investir dans son éducation pour pouvoir maximaliser la créativité de sa jeune population et trouver des solutions locales à ses nombreux problèmes.  On doit pouvoir aussi atteindre certains équilibres essentiels comme l’autosuffisance alimentaire, la transformation locale de nos ressources, et le développement des services de base de notre société. En outre, nous devons aussi investir dans l’accès à l’internet, la sécurisation et la valorisation de nos données qui sont l’or de l’âge de la communication et de l’économie de la connaissance. », a martelé ce digne fils du pays.

Les sciences mathématiques étant un univers en elles-mêmes marqué par l’élégance et la rigueur, elles sont aussi au cœur de toutes les autres sciences. C’est un langage commun, un outil pour modéliser le monde et résoudre des problèmes. Les physiciens sont formés pour résoudre des problèmes avec des outils souvent imparfaits. À chaque fois que le monde est confronté à un nouveau défi, les physiciens étaient en première ligne : l’énergie nucléaire, la naissance de l’internet et son développement, les nouvelles méthodes en biologie, l’utilisation de la modélisation mathématique en finance, la révolution du Big data. Tous ces sujets demeurent encore un champ à développer en RDC. Et le professeur congolais de Northeastern University veut aider à faire évoluer les choses.

Dans son travail de tous les jours, le professeur utilise la théorie des cordes comme une muse pour formuler des questions de géométrie qu’il peut ensuite résoudre comme des questions de mathématiques ordinaires. Actuellement, le chercheur congolais travaille sur la géométrie birationnelle des fibrations elliptiques et certains aspects de la théorie des représentations des compactifications de cordes. En RDC, il enseigne mais pas ce à quoi la plupart des gens s’attendraient. Au Congo, il a fait le choix de favoriser l’enseignement primaire, secondaire, et les programmes de formation des professeurs du secondaire.  Jonathan Esole enseigne les mathématiques aux jeunes filles du village de Kalebuka à Lubumbashi avec l’association Malaika de Noëlla Coursaris. Son but en faisant cela est de mettre l’accent sur le besoin de créer une nouvelle génération qui est sophistiquée en science et en codage, et qui est prête à concourir et à gagner. Il compte apporter les mathématiques dans son élégance et sa rigueur à la plus jeune fille du plus petit village du Congo. « Si nous pouvons faire cela, alors nous pouvons faire tout le reste », affirme-t-il.

Soixante et un ans après, Jonathan Esole pense que l’avenir de la RDC sera ce que nous en faisons maintenant. Nous ne devons pas baisser nos standards et nous rappeler qu’il n’y a pas de paix sans justice et que notre dignité dépend de notre capacité à être des solutions à nos propres problèmes. L’Injustice, la corruption, les excuses demeurent les comportements à supprimer pour voir le développement du Grand Congo.

Par ailleurs, Son Congo idéal, serait celui où le pays est une lumière pour l’Afrique et le monde. «Notre positionnement géographique montre que nous pouvons développer un pays tout en respectant la Nature. Nous célébrons notre diversité et définissons un vivre ensemble dans lequel tous, nous pouvons avoir accès à l’éducation et aux opportunités de nous améliorer et d’être créatifs. Nous innovons et jugeons notre succès par le succès des plus pauvres et des moins fortunés de notre société. Nous choisissons librement nos propres dirigeants et nous nous réunissons autour d’objectifs communs pour construire la société que nous voulons pour les générations futures » a-t-il conclu.

Henock KUMBALI

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